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Dental Tribune Édition Française No.11, 2017

8 PRÉVOYANCE Dental Tribune Édition Française | Novembre 2017 © Brian A Jackson/Shutterstock.com équipes. L’ANI finalement n’a fait que préci- piter leur décision et conformément à ce qui relevait de leur initiative, ils ont souvent proposé une solution bien au-delà du mini- mum légal, l’ANI leur apparaissant comme un outil de fidélisation de leurs collabora- teurs(trices). Les acteurs du marché ont dû s’adapter et se moderniser Mais qu’en ont pensé les acteurs du mar- ché, concernés au premier chef en tant que concepteurs de produits et gestionnaires de solutions ? Il faut se rappeler que le marché du collec- tif (comprenons, le marché des entreprises), fut le théâtre ces dernières années d’un combat sans merci relevant du feuilleton à rebondissements. Le point d’accrochage tenait aux fa- meuses « clauses de désignation » qui ont fait couler beaucoup d’encre. Ces clauses de désignation étaient des dispositions figurant dans les conventions collectives, obligeant les entreprises d’une même branche à souscrire une mutuelle au- près d’une institution désignée et imposée. Les acteurs bénéficiaires de ces clauses, essentiellement des Institutions de Pré- voyance, se sont battus avec ténacité pour ne pas être dépossédés d’une clientèle dé- diée. La bataille fut longue, à la hauteur des enjeux qu’elle représente pour les parties concernées. Ces clauses ont été invalidées par une dé- cision du 13 juin 2013 du Conseil Constitu- tionnel mais les promoteurs de ces clauses n’ont cependant pas encore dit leur dernier mot, et semblent encore espérer un retour en arrière. Quoi qu’il en soit, cette démarche qui tend à mettre l’entreprise au centre de la protection sociale est un mouvement enta- mé depuis quelques années et représente une formidable opportunité pour l’en- semble des acteurs, au premier rang des- quels les assureurs, les grossistes, bref ceux qui créent les solutions. Bien sûr, cela ne va pas sans leur poser quelques difficultés. Car pareille volonté va de pair avec une adaptation lourde de l’orga- nisation avec pour conséquence des coûts importants générés, une modernisation né- cessaire des offres, un ajustement de l’outil informatique, cheville ouvrière du disposi- tif ... et une montée en gamme des équipes. Et on a pu d’ailleurs observer quelques diffi- cultés rencontrées au pic de l’ANI chez cer- tains acteurs victimes de leur succès. A leur crédit, notons tout de même que des moyens considérables ont été mis en œuvre pour régler le plus rapidement possible les désagréments occasionnés. Tout ceci finalement a surtout engendré une redistribution des cartes avec une accé- lération du phénomène de concentration sur le marché des mutuelles. Si on prend un peu de hauteur, que nous est-il donné d’observer à ce jour ? Des évolutions inté- ressantes à n’en pas douter… Le recours aux nouvelles technologies devenu incontournable. Depuis un certain temps, les assureurs tentent de se mettre à la numérisation ; mais force est de constater que l’ANI a probablement accéléré le mou- vement. Les grands intervenants du marché annoncent les uns après les autres qu’ils entrent dans l’ère du « Full Digital ». Et oui, la numérisation au service de plus de rapidité avec l’accès à l’information faci- lité (affiliation, adhésion, émission des contrats et des cartes tiers-payant en quasi instantané), plus d’efficacité (avec un ratio d’erreurs revu à la baisse), plus de simplici- té et de fluidité (moins d’intervenants en gestion), et en bout de course, peut-on es- pérer une amélioration des coûts de fonc- tionnement. Dernier point, indispensable au demeurant, dans un secteur où les coti- sations augmentent mécaniquement de- puis plusieurs années, en raison du retrait progressif de la sécurité sociale et de l’aug- mentation croissante des besoins en ma- tière sanitaire, corollaire du vieillissement de la population et des progrès de la méde- cine. Et on peut bien imaginer que cette déma- térialisation des procédures, et cette auto- nomisation des clients qui finalisent leur adhésion eux-mêmes avec la signature élec- tronique, permettra aux compagnies d’as- surance de redéployer leurs forces vives sur d’autres fonctions. Ainsi donc, le métier s’inscrit dans un cercle vertueux. Le secteur de l’assurance, à l’instar d’autres secteurs, poursuit sa révolution numérique. La digitalisation s’inscrit donc dans un mouvement général. 55 millions d’inter- nautes, 32 millions d’utilisateurs des ré- seaux sociaux, 40 millions de Smart- phones2 … Les clients sont dorénavant ultra connectés et aspirent logiquement à plus d’interactivité. Et n’oublions pas que les générations montantes seront toutes des « digital natives »3. Et tant mieux au vu des bénéfices qu’en retire en fin de parcours le client. Car c’est bien tout le sens d’une démarche commer- ciale, un client satisfait et heureux. Poussons encore l’observation. On s’aper- çoit alors, que de cette évolution fertile, il faut aussi voir l’émergence de nouveaux concepts comme l’assurance collaborative. La prise en compte des profils d’assurés pour la gestion des risques. Il fallait y penser. La digitalisation comme principe, avec en supports des algorithmes dédiés, et voici que l’on crée des commu- nautés d’assurés (dans l’ère du temps di- rons-nous, car cela ne va pas sans rappeler les twitters, facebook, instagram, linkedin et autres réseaux sociaux). L’idée, concep- tualisée par de nouveaux acteurs comme Otherwise, consiste à redistribuer aux membres de la communauté les bénéfices techniques réalisés au bout d’une année ; pour ce faire, le dispositif s’appuie sur un sentiment d’appartenance à un groupe, et encourage par là-même des comporte- ments responsables en matière de consom- mation médicale. On crée des groupes aux modes de vie si- milaires, aux profils de risque homogènes, voire à des sensibilités approchantes. Et en- core plus intéressant, ces groupes vont s’au- togérer en quelque sorte, se responsabiliser dans leur consommation. Finalement, le sous-jacent de cette démarche, n’est-ce pas la prévention et la sélection des risques ? Ni plus ni moins que les fondamentaux de l’as- surance ! Mais l’astuce, c’est faire en sorte que le client s’approprie ces aspects pour mieux les mettre en œuvre. Ce n’est plus l’assureur qui organise les garde-fous. On peut donc parier sur une plus grande effica- cité dès lors que les clients seront moteurs de leurs propres choix de consommation. Pourquoi pas un ANI prévoyance? Une autre évolution peut à ce stade s’en- visager. Celle qui consisterait à mutualiser le risque lourd par excellence, celui de l’in- validité. La convention collective de 1947 pour les cadres organise une couverture au travers d’une garantie décès obligatoire ; l’entre- prise doit prévoir des capitaux décès équi- valents à trois années de salaire, sous peine, en cas de non respect, de sanctions fortes. A l’instar de cette disposition, on s’inscri- rait alors dans une forme de cohérence et de continuité, mais aussi plus globalement, de réelle prévention. Certains experts du marché de l’assu- rance pensent d’ailleurs qu’il eut été préfé- rable de commencer par là car les besoins de couverture restent à améliorer, et les en- jeux financiers pour les salariés potentielle- ment colossaux. Les mutuelles bénéfi- ciaient déjà d’un large déploiement ; les be- soins n’étaient donc pas de même ampleur. En revanche, imaginons un instant, une maladie ou un accident rendant une per- sonne invalide à 40 ans. C’est toute la vie du salarié et de sa famille qui se retrouve boule- versée, profondément et durablement. Ne s’est-on pas trompé de combat en se mobili- sant pour la mutuelle au détriment de la pré- voyance ? La question mérite d’être posée. Sans oublier, qui plus est, une situation qui nous préoccupe collectivement de plus en plus : la dépendance. Invalidité et dépendance sont malheu- reusement des risques qui s’inscrivent dans le temps long. Et qui de fait nécessitent une approche et des réponses assurantielles adaptées. Qui n’a pas vécu à titre personnel ou au travers de l’expérience d’une connaissance, la déchéance physique ou mentale d’un proche avec son cortège de difficultés, tant la prise en charge de ces pathologies aux formes diverses est excessivement compli- quée et formidablement coûteuse. Le finan- cement d’un EHPAD revient entre 2.800 et 3.500 € mensuels, budget qui n’est pas à la portée de toutes les bourses. Et encore faut- il trouver une place dans un établissement spécialisé, ce qui relève parfois du parcours du combattant. Il ya là une urgence à régler, un véritable enjeu de société. Il conviendra alors d’avoir un débat : – doit-on avoir un ANI prévoyance après avoir eu l’ANI santé ? – doit-on rendre obligatoire la prévention ? – doit-on supprimer les clauses d’exclusion dans les contrats ? – le droit à l’oubli est en vigueur sur les contrats emprunteurs ; doit-on l’étendre aux contrats de prévoyance ? Et la boucle est bouclée ! On revient à la di- gitalisation, qui participe d’un cercle ver- tueux car, au travers des nouvelles technolo- gies, elle permet l’amélioration de la connais- sance du risque et donc une meilleure préven- tion pour une prise en charge plus efficace. La médecine vit la révolution du géno- type et autorise déjà l’émergence de traite- ments différenciés et personnalisés. Il ne s’agira plus de dire à chaque maladie sa mé- dication, mais à chaque personne sa médi- cation. Quelle révolution ! L’assurance devra aussi affiner sa connais- sance du risque pour offrir des solutions de plus en plus fines et personnalisées. Tout en maintenant la mutualisation sur le plus grand nombre. Cela paraît antinomique, et pourtant.... Le marché de « l’insurtech » (ou écosys- tème de start-ups) se développe fortement depuis peu. Il va rajeunir et moderniser l’as- surance en s’appuyant sur les nouvelles technologies. A côté des modèles statis- tiques traditionnels, les assureurs pourront alors s’appuyer sur des modèles prédictifs. Les salariés attendent beaucoup de leur entreprise. Et les dirigeants, qui poursuivent en toute logique l’objectif de générer de la richesse pour en assurer la pérennité (car faut-il le rappeler, c’est la raison d’être même de l’entreprise), verront à n’en pas douter, tout le bénéfice à tirer d’une meil- leure intégration de la protection sociale dans la démarche entrepreneuriale. Mais à la seule condition, de les convaincre du bien-fondé de la démarche, et d’une relation gagnant-gagnant (salariés et entreprise). Le tout dans une sorte d’interaction féconde. Quant aux assureurs, leur responsabilité est immense. Plus que jamais, on attend d’eux qu’ils soient inventifs, innovants, et qu’ils fassent ce qu’ils savent faire le mieux : assurer l’Homme pour protéger son avenir. Mais aussi, qu’ils soient vigilants car le digi- tal pose la question de la sécurité des don- nées. « La vieillesse est un naufrage » avait écrit le Général de Gaulle4. Concept dépassé de nos jours ! Elle est d’abord un défi et, plus que jamais, à l’aube de ce 21e siècle, une fa- buleuse source d’inspiration. Il est donc essentiel de ne pas voir les évo- lutions en marche comme des contraintes, mais plutôt comme des leviers d’innova- tion. Et avoir confiance dans la capacité de chaque partie prenante à prendre toute sa place pour participer de la dynamique. Cette dynamique, a commencé a redistri- buer le marché de la couverture et va conti- nuer à modifier le paysage. Il faut regarder la société de demain diffé- remment, et voir du potentiel, là où l’on voyait des écueils. Le trait d’union d’une so- ciété, entre une jeunesse et ses ainés est à ré- inventer. Et cela impliquera de trouver des réponses adaptées au maintien de protec- tions de santé efficaces et financièrement accessibles, tout au long de la vie. L’assurance, assurément, n’a pas fini de faire peau neuve. 2 selon étude annuelle de l’agence We Are Soci- al, publiée fin 2016 3 le natif numérique est une personne ayant grandi dans un environnement numérique (PC, internet, smartphone, tablettes, MP4, montres connectées ...) 4 Charles de GAULLE (1890-1970), Mémoires de guerre, tome I, L’Appel, 1940-1942 (1954) Mme Karine Guatel · DESS droit des assurances · Institut des assurances de Paris · Gérante de Prométhée expertise et courtage, membre du groupe Sofraco. Cabinet de courtage spécialisé en protection sociale du dirigeant et du professionnel indépendant, créé en juillet 2011. · Son domaine de compétences : (Retraite, Prévoyance, Mutuelle, Epargne) · Pavillon Voltaire, 17 rue Léon Martine 92290 Châtenay-Malabry · www.promethee-expertiseetcourtage.com

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