4 CAS CLINIQUE Dental Tribune Édition Française | 2/2024 Traitement de patients atteints de maladies parodontales graves dans un cabinet dentaire général Dr Yana Witschel et Ioana Brandlmeier, Allemagne Selon les données actuelles, en- viron dix millions de personnes en Allemagne sont atteintes de paro- dontite grave. Cette maladie est as- sociée à l’extraction des dents et à la perte de l’esthétique dento-faciale, prothétique peut s’avérer très com- plexe. Le traitement est cependant peu fréquent et lorsqu’il est entre- pris, il reste en deçà de ce qui est né- cessaire pour répondre aux besoins des cas parodontaux existants. Nous savons que la gravité d’une maladie parodontale est en partie liée à des bactéries très agres- sives que seule une antibiothérapie permet d’éliminer. Toutefois, nous faisons face aujourd’hui à un pro- blème qui ne cesse de prendre de l’ampleur depuis quelques années et est devenu une question majeure de santé publique, la résistance aux antibiotiques. Dans la mesure où une antibiothérapie est souvent iné- vitable en cas de maladie parodon- tale, le traitement ne doit donc ja- mais être envisagé sans une analyse microbiologique et l’utilisation de doses appropriées d’antibiotiques ayant un index thérapeutique le plus étroit possible. Dans cet article, nous présen- tons le traitement d’un patient de 51 ans atteint d’une parodontite chro- nique grave et généralisée. Après un examen approfondi et un plan de traitement minutieux, ainsi qu’une antibiothérapie adjuvante et un suivi étroit, nous sommes parvenus à un résultat stable et satisfaisant. Présentation du cas Lors de la consultation, le pa- tient ressentait une douleur au ni- veau de la dent 36. Une radiogra- phie panoramique a révélé une perte osseuse généralisée dans la dimension horizontale et très mar- quée dans la dimension verticale au- tour des dents 13, 36, 33, 43 et 47. Selon l’anamnèse, le patient n’était sion artérielle qu’il maîtrisait au moyen d’un traitement par ramipril et hydrochlorothiazide (RamiLich, Zentiva Pharma). Un traitement pa- rodontal avait déjà été réalisé en 2021 par un autre chirurgien- dentiste, qui avait recommandé l’extraction des dents 36, 43 et 47, mais sans y procéder. L’examen clinique a révélé une rougeur et un saignement des gen- cives, ainsi qu’une douleur lors du test du mordu. Les dents 18, 17, 11, 21, 26, 28, 32, 31, 41 et 32 à 42 étaient manquantes, et le patient portait un bridge de 13 à 23, et un second de 33 à 43. L’indice de dépistage parodon- 1 tal indiquait des valeurs de 3, 4, 4, 4, 4 et 4 pour les dents 16, 27, 36 et 46 (en mésio-vestibulaire, mésio- palatin, disto-vestibulaire, et disto- palatin), respectivement. Le patient, dont l’hygiène bucco-dentaire était moyenne, présentait une certaine quantité de tartre et de plaque, sur- tout dans les zones proximales. Une radiographie panoramique n’a révélé aucune radio-opacité dans le sinus maxillaire et aucune temporo-mandibulaires. Par contre, plusieurs dents présentaient des radio-opacités indiquant la présence d’obturations. On observait une perte osseuse horizontale modérée (environ 50 %) généralisée, ainsi qu’une perte osseuse verticale très importante en mésial de la dent 13, en distal de la dent 36, en mésial de la dent 33, en distal de la dent 43, et en mésial de la dent 47 tout comme dans la furcation de cette dent (Fig. 1). En raison des valeurs élevées de l’indice de dépistage parodontal, un d’évaluer l’état de santé parodontal. Les mesures de la profondeur de poche au sondage, du saignement au sondage et de la mobilité ont été 2). La dent 37 présentait une mobilité de grade I et aucun problème po- tentiel de furcation, tandis la radio- graphie montrait visiblement une atteinte au niveau de la furcation des dents 36 et 47. Compte tenu du bilan de santé parodontale, qui in- diquait des profondeurs de poche au sondage de 7 et 8 mm, dont une de 12 mm (dent 13), ainsi que des exsudats purulents au niveau des dents 13, 27 36, 33 et 43, une ana- lyse microbiologique supplémen- a révélé une concentration élevée de bactéries telles que Tannerella forsythia, Treponema denticola et Prevotella intermedia, ainsi qu’une concentration très élevée de Porphy- romonas gingivalis et d’Aggre- gatibacter actinomycetemcomitans (Fig. 4). Les résultats radiographiques, le bilan de santé parodontale et l’analyse microbiologique ont mené à un diagnostic de parodontite chro- nique généralisée grave avec exa- cerbation aiguë au niveau des dents 13, 36, 33, 43 et 47. traitement tartre 1. Élimination de toute la plaque et du et sous-gingival cliniquement acces- sible (curetage fermé) ; supra-gingival 2. antibiothérapie adjuvante en rai- son des résultats de l’analyse mi- crobiologique ; 3. évaluation répétée et mesures d’entretien dans le cadre d’un et 4. intervention chirurgicale (ap- proche ouverte) le cas échéant. Évolution du traitement La première visite a consisté en un entretien à visée informative et clinique sur les résultats, le dia- gnostic et les facteurs de risque liés aux maladies parodontales. Le patient a reçu des conseils pré- cis sur des aspects tels que la nu- trition, la gestion du stress et les interactions potentielles avec ses médicaments antihypertenseurs. Un contrôle de l’hygiène bucco- dentaire, documenté selon l’indice de plaque proximale de Lange (60 %) et l’indice de saignement au son- dage du sillon gingivo-dentaire puis le patient a reçu des re- commandations sur les mesures d’hygiène bucco-dentaire à prendre à domicile. Pour terminer, un traitement parodontal non chirurgical a été réalisé et une antibiothérapie a été prescrite au patient, conformé- ment au schéma proposé par Van line trois fois par jour et 400 mg de métronidazole trois fois par jour pendant sept jours). Un traitement antibactérien consistant en un bain de bouche à la chlorhexidine à 0,2 % deux fois par jour pendant sept jours a également été recom- mandé. Pour favoriser la réussite du traitement, une désinfection complète de la cavité buccale a été réalisée à chacune des visites sui- vantes consacrées au traitement parodontal. Examens de suivi Le premier examen de suivi a montré une tendance favorable à la cicatrisation. Aucune rougeur, vée. Lors de la deuxième visite de suivi, un léger sondage du rebord gingival n’a causé aucun saigne- ment. Les gencives ne présen- taient aucune anomalie. Une pre- mière évaluation de la profondeur exacte des poches a été prévue et tard. Les visites suivantes ont été pour le traitement parodontal de soutien. La première visite réalisée dans le cadre du traitement parodontal de soutien a consisté à évaluer le parodonte par deux mesures des profondeurs de poche et deux tests de saignement au sondage au niveau de chaque dent. Ces évalua- tion générale, notamment une évo- lution particulièrement favorable de la dent 13 (poche réduite de 12 mm à 6 mm en distal), de la dent 27 (poche réduite de 6 mm à 3 mm en mésial), de la dent 36 (poche ré- duite de 8 mm à 5 mm en distal), de la dent 33 (poche réduite de 8 mm à 5 mm en mésial) et de la dent 43 (poche réduite de 9 mm à 6 mm en mésial). Le contrôle de l’hygiène bucco-dentaire (indice de plaque proximale selon Lange) a indiqué une amélioration de 20 %. L’indice de saignement au sondage du sil- lon gingivo-dentaire s’était égale- ment amélioré de 25 %. Des recom- mandations sur l’hygiène bucco- dentaire à domicile ont de nouveau été données au patient. La gencive des deux arcades montrait une évolution très satisfaisante. En- suite, un traitement parodontal a été réalisé sur les dents présentant une profondeur de poche de 4 mm ou plus, ainsi qu’un nettoyage den- taire professionnel de toutes les dents. Le patient ne ressentait plus aucune douleur lors du test du avaient disparu. L’attitude du pa- tient dénotait une évolution posi- tive en termes d’hygiène bucco- dentaire et de gestion des facteurs ses habitudes alimentaires, notam- ment par une consommation quo- tidienne de fruits, de légumes et d’eau pour se désaltérer. Un ré- gime alimentaire sain, plus préci- sément un régime à faible indice glycémique et riche en acides gras ments et en éléments végétaux se- 1 2 Fig. 1: Radiographie panoramique avant le traitement. Fig. 2: Mesure avant le traitement.