opinion D’un IDS à l’autre… Dr Jean-Luc Berruet, France 2019… Une foule dense et cosmopolite ! Une ruche avec ses al- véoles de business et le bruit qui les accompagne. 2021… La moitié des halls d’exposition occupée, des allées de dix mètres de large et 10 % des visiteurs habituels… La fête s’est transformée en pénitence (Fig. 1) !! Le coronavirus a fait d’immenses dégâts et il faudra probable- ment des années pour que la fréquentation et la joyeuse efferves- cence des derniers IDS regagnent leurs galons. Imaginez la situation : Dentsply Sirona : absent, Carestream : absent, Medit : absent, Henry Schein : absent, Dental Wings : ab- sent, Biotech Dental, notre champion national : absent, etc., rien que de petites entreprises du monde dentaire ! Fallait-il que les organisateurs maintiennent cette manifesta- tion ? Là est la question. Si c’était pour la conserver « coûte que coûte », pourquoi pas ? La peur que le ressort ne se casse, a-t-elle poussée les organisateurs à l’organiser après l’avoir retardée ? Probablement ! Sinon, on comprend mal les efforts produits et la logistique mise en place pour ce moment de misère. Mais on sa- lue leur ténacité ! Espérons pour Cologne, le Messe et l’industrie du dentaire, que cet IDS et le coronavirus ne soient plus que de mauvais souvenirs en 2023 ! Un intérêt évident, à travers le déplacement de mars à sep- tembre : les conditions météorologiques et les soirées lumineuses de ce début d’automne. Personnellement, je voterais pour main- tenir l’IDS fin septembre ! Mais je perds toujours les élections, et j’ai cru comprendre que le mois de mars serait de nouveau le mois de l’IDS en 2023. Dont acte. Heureusement, dans cet océan de tristesse, quelques pépites tout de même. Et l’empreinte optique dans ce contexte ? Comme le reste, dramatiquement morne ! Ce qui a permis et c’est tout à leur honneur, de mettre en lumière et de confirmer les promesses de quelques ca- méras immatures en 2019 et désormais achetables ! À ce titre, les asiatiques Launca Medical, Runyes, PANDA et SHINNING 3D. Des produits enfin opérationnels à des tarifs… canons ! La caméra d’empreinte optique à 10 000 € TTC ? C’est désor- mais commun. Entendons-nous, à ce prix-là, vous ne disposez que de la caméra. Il vous faudra y ajouter un PC musclé et, au besoin, un cart pour supporter et déplacer le tout. Le package s’élève entre 14 000 et 17 000 € TTC. C’est tout de même extrêmement at- tractif. Ce qui confirme la tendance de 2019 : la démocratisation de l’empreinte optique. Malheureusement, ce satané coronavirus est venu saper en grande partie ce bel élan. Deux ans pour rien, même si, ici et là, des praticiens ont mis à profit cette sinistre époque de restrictions tous azimuts pour introduire cette techno- logie dans leur pratique. Il paraît qu’il faut mettre à profit les pé- riodes « creuses » pour se moderniser. Respect à ces courageux confrères et consœurs. Revenons à nos caméras. On en comptait une vingtaine en 2019 avec les trois leaders : iTero Element 5D, TRIOS 3Shape version 4 et la nouvelle excellente Primescan de Dentsply Sirona, suivis par un autre trio comprenant : Carestream 7000, Emerald Planmeca et la très surprenante Medit i500. À distance, un grou- petto d’une bonne douzaine de caméras prometteuses, nécessi- tant toutefois d’évidentes améliorations. Enfin, la voiture- balai chargeant à son bord des caméras-gags dont le mérite était inversement proportionnel au bruit fait autour d’elles ! Cette année, j’en ai dénombré huit ! Dont les valeurs sûres iTero et Emerald, présentes sur le stand de leur fabricant. Les TRIOS 3Shape et Medit i700 se trouvaient, quant à elles, chez des partenaires divers et variés de la CFAO, mais point de stand de leur fabricant. Honneur à la reine de l’empreinte optique : la nouvelle caméra iTero Element d’Align Technology (Figs. 2–4). Un modèle très sé- duisant, léger, facilement transportable en version « cartable », avec sa poignée-support d’écran. La portabilité au service de la pédagogie, c’est la nouvelle orientation de la maison, pour diffu- ser plus largement les traitements orthodontiques. Scannage en 60 secondes des deux arcades et de l’occlusion, reconstitution 3D accélérée et simulation orthodontique instantanée avec le logiciel Outcome Simulator, permettent au patient de se faire une idée assez fidèle du résultat d’un éventuel plan de traitement. Si Align Technology peut annoncer 48 millions de scans à son actif, la société et ses concurrents ont intérêt à suivre de près ce que je considère comme l’innovation majeure de cet IDS, à savoir l’impression 3D directe d’aligneurs. En effet, les coréens de Graphy (Figs. 5 et 6) ont frappé un grand coup, qui risque d’ébranler très sérieusement toute l’industrie du secteur, si toutefois le produit tient ses promesses ?! Ne nous enflammons pas. Wait and see. Ceci dit, l’inventeur de l’aligneur imprimé directement sans passer par l’impression fastidieuse et onéreuse d’innombrables modèles, ainsi que par le thermoformage d’aussi nombreux aligneurs, peut espérer des jours heureux à la Elon Musk, si, je le répète, ce pro- duit apporte les garanties que nous en attendons. C’est tout le mal qu’on lui souhaite ! Mais retenez ce nom, Graphy, je pense que l’on va en entendre beaucoup parler dans les années à venir. Parenthèse impression 3D refermée, Planmeca a fait « le mé- tier » en présentant sa caméra Emerald. C’est tout à l’honneur de Planmeca de ne pas avoir boudé cet IDS, malheureusement, rien de bien neuf du côté de la caméra. Launca, cette caméra (Fig. 7) qui tentait de percer en 2019, est enfin aboutie : fluide, en couleurs, fiable, ergonomique. Les chinois nous ont donc présenté un bel et bon produit au prix du « marché » soit aux environs de 17 000 € TTC, caméra, PC et cart compris, et on sait ce que cela veut dire quand un produit chinois est perfor- mant, à un prix abordable et désormais disponible en Europe ! SHINING 3D : les Chinois font aussi du joli marketing et de l’intégration logicielle. Celle-ci est impressionnante dans les work- flows et dans la gestion des artefacts, recourant très intensément à l’intelligence artificielle. SHINING 3D confirme donc les belles promesses de 2019. Idem que précédemment : adieu la poudre et les images en niveaux de gris. Cette fois-ci, fluidité, couleurs et ergonomie sont au rendez-vous (Fig. 8). Runyes : cette deuxième caméra coréenne est désormais un excellent produit, passé rapidement du prototype de 2019 à un outil de série très probant au tarif « chinois » dans la zone des 17 000 € TTC tout compris, 9 900 € TTC la caméra seule (Fig. 9). Modern Clear – Panda P2 : cette société allemande présentait le clou du spectacle : une nouvelle caméra chinoise, dénommée Panda P2 (de la société FREQTY-Pìngtum), extrêmement sédui- sante en matière de taille, de précision, de fluidité, d’ergonomie et de prix puisque proposée à 9 900 € TTC seule, 14 000 € TTC avec PC portable, 17 000 € TTC avec cart, PC sous forme de tour et grand écran, soit une configuration très attractive. Le fait que cette caméra soit distribuée en Europe par une société allemande a un côté rassurant et pratique. La publicité prétend que c’est le plus petit scanner vidéo intra-oral du « monde » ? À voir et à tes- ter ! Reste à cette nouvelle venue l’obligation de faire ses preuves, comme toujours (Fig. 10). Conclusion Bravo aux entreprises qui ont joué le jeu ! Les autres, que dire ? Au prétexte que le coronavirus a perturbé l’organisation et la date de cette manifestation, de grandes entreprises du dentaire n’ont pas voulu prendre le risque d’un fiasco. D’un point de vue objectif, ce fut un fiasco, c’est certain ! Et alors ? Heureusement qu’elles n’ont pas toutes suivi ce triste réflexe moutonnier. Car, à ce régime-là, elles pourraient bien prendre la même décision pour 2023, rien n’indiquant de manière certaine que la situation sera alors parfaitement claire quant à la pandémie de Covid-19 ?! Dès lors, si l’on suivait cette logique douteuse, plus rien ne pourrait se produire en matière d’expositions. C’est donc l’occasion de féliciter les entreprises qui ont osé monter un stand lors de cet IDS 2021. Attention au serpent qui se mord la queue !! Concernant l’empreinte optique, rien de particulièrement in- novant sur le plan technique. Juste une arrivée à maturité de plu- sieurs caméras asiatiques passées du probable au certain. Désor- mais le marché propose au moins deux caméras coréennes (Medit i700, Runyes 3DS) et trois chinoises (Aoralscan 3, Launca DL-203, Panda P2), no comment, isn’t it ? Des produits aboutis à prix très attractifs. Le marché dentaire de l’empreinte optique va- t-il suivre ceux d’autres produits high-tech ? C’est à craindre pour les industries européennes, américaines et japonaises (cette der- nière étant bien timide en la matière). Tant mieux pour les clients dentistes ! Ils vont pouvoir s’équiper en nombre et transformer l’essai de la démocratisation, initié il y a deux ans et contrarié en 2020. Les choses semblant s’arranger côté pandémie, on peut penser raisonnablement que l’élan de 2019 va reprendre et voir enfin la mesure 3D des dents devenir un lieu commun. Mon petit doigt me dit qu’une nouvelle innovation, encore au niveau du la- boratoire, va bientôt faire basculer définitivement notre profes- sion dans le domaine de la digitalisation et du numérique. Mais ceci est une autre histoire et fera bientôt l’objet d’un autre article… 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 Fig. 1 : Le hall 4.1… transformé pour l’occasion en immense restaurant et en practice de golf. Fig. 2 : Nouvelle version portable d’iTero element.Fig. 3 : La poignée devient support.Fig. 4 : Classe, ergonomie, hygiène et efficacité. Fig. 5 : Explica- tions techniques. Fig. 6 : Le matériau « révolutionnaire » tant attendu est-il arrivé ? Fig. 7 : Scanner Launca DL-206.Fig. 8 : Scanner Aoralscan 3 de SHINING 3D.Fig. 9 : Scanner Runyes 3DS.Fig. 10 : Scanner Panda P2. 14 ADF Paris 2021 · 26/27 novembre