CAD/CAM Tribune Édition Française | Août/Septembre 2021 RECHERCHE 23 Les purificateurs d’air pour atténuer le risque de transmission de la Covid-19 Jeremy Booth, Dental Tribune International La pandémie a été une période éprouvante pour les chirurgiens-dentistes, en particu- lier pour les dentistes employeurs qui doivent prendre des décisions pouvant in- fluencer la sécurité de leur équipe de soins. Des études récentes ont montré que le taux de transmission du SARS-CoV-2 dans les éta- blissements dentaires, a été inférieur à ce qui était prévu lorsque la pandémie a été déclarée, et la littérature a montré que les purificateurs d’air pourraient jouer un rôle dans la réduction des taux de transmission. En août dernier, des scientifiques ont ex- horté l’Organisation mondiale de la santé à reconnaître que le SARS-CoV-2 pouvait se propager par le biais de microgouttelettes suffisamment petites pour rester en sus- pension dans l’air1 pendant de longues pé- riodes. À cette époque, de nombreux pro- priétaires d’établissements de soins den- taires avaient déjà revu et amélioré leur sys- tème de ventilation supplémentaire, et beaucoup d’autres l’envisageaient. L’utilisa- tion de purificateurs d’air pour réduire le risque de transmission dans les milieux dentaires a depuis été validée par diverses études scientifiques ; toutefois, l’incerti- tude demeure. Une étude réalisée en avril 20212 par le Scottish dental clinical effectiveness pro- gramme (SDCEP) a examiné la littérature ré- cente concernant l’atténuation des procé- dures génératrices d’aérosols (PGA) dans le domaine dentaire. De nombreux articles de recherche étaient de nature expérimentale et n’ont pas tous été examinés par des pairs, en raison de l’abondance des recherches scientifiques actuellement menées et de l’urgence de les publier. L’examen du SDCEP a révélé que les purificateurs d’air n’étaient © Syda Productions/Shutterstock.com pas recommandés pour réduire le risque de transmission du SARS-CoV-2, en raison de l’absence de « certitude de preuve concluante » sur leur efficacité en tant qu’outil d’atténua- tion. L’une des études analysées par le SDCEP avait été publiée par des chercheurs britan- niques en novembre 2020 dans le British Dental Journal. Les chercheurs ont mesuré et comparé le nombre de particules pen- dant les PGA qui ont été menées, avec et sans l’utilisation d’une extraction à haut volume. Ils ont conclu : « Sans l’utilisation d’un dispositif externe d’extraction à haut volume pendant les procédures générant des aérosols, il y a une augmentation signifi- cative du nombre de particules de taille PM2,5- et PM10 provenant de l’utilisation de petits équipements à micromoteur à grande vitesse, à turbine à air à grande vitesse, à vi- tesse lente et à ultrasons. » L’étude, intitulée « A clinical study measuring dental aerosols with and without a high-volume extraction device », a été publiée dans le British Dental Journal le 20 novembre 2020.3 Le système d’aspiration extra-oral (EOS [extra-oral scavenger]) réduit le nombre de particules. L’examen du SDCEP cite égale- ment une étude réalisée par des chercheurs du Royaume-Uni et publiée sur le serveur de préimpression medRxiV en janvier. L’étude a examiné le calcul du temps de renouvelle- ment d’air (temps de jachère) après les PGA dans des établissements de soins ventilés manuellement et avec un dispositif, et a examiné si l’utilisation de système d’aspira- tion extra-oral pouvait réduire la produc- tion d’aérosols et le temps de jachère. Ils ont constaté que les AMP réalisées dans des salles de soins ventilées manuellement, pro- duisaient un faible taux de particules, qui revenait à la ligne de base dans un délai de dix minutes après l’AMP. Il s’est avéré que l’EOS avait un effet plus important dans les environnements non ventilés mécanique- ment et qu’il réduisait le pic du nombre de particules dans les salles ventilées mécani- quement. Les auteurs ont écrit : « Les PGA ne devraient pas être réalisées dans les cabi- nets de consultation où la ventilation n’est pas possible. La ventilation mécanique pour les PGA devrait être la norme d’or ; lors- qu’elle n’est pas disponible ou pratique, l’utilisation d’une ventilation naturelle avec EOS permet de réduire le temps de renou- vellement d’air . » L’étude, intitulée « Fallow time determination in dentistry using aero- sol measurement », peut être consultée sur le site de medrxiv.4 En mai, des chercheurs allemands ont étudié la concentration de petites particules causées par les PGA en médecine dentaire sous aspiration à haut débit, avec et sans l’utilisation d’un appareil EOS mobile. Un nombre inférieur de particules a été détecté après la préparation de dents, lors de procé- dures de traitements à grande vitesse avec l’utilisation d’un dispositif EOS. Les cher- cheurs ont constaté que l’aspiration à haut débit était efficace pour réduire le nombre de petites particules, qui était encore réduit par l’utilisation d’un appareil EOS. « L’utilisation supplémentaire d’un dis- positif EOS doit être soigneusement envisa- gée lors de la réalisation de traitements, tels que la préparation des dents lors des procé- dures de traitements à grande vitesse, qui génèrent des particules particulièrement petites lorsque davantage de personnes sont présentes et que toutes les autres op- Il a été démontré que les systèmes de purification de l’air réduisent le nombre de particules et le temps d’attente après les procédures générant des aérosols dans les établissements dentaires. tions de protection ont été épuisées », écrivent les auteurs. L’étude, intitulée « The efficacy of an extraoral scavenging device on reducing aerosol particles 5 μm during dental aerosol-generating procedures : An exploratory pilot study in a university set- ting », a été publiée dans BDJ Open le 20 mai 2021.5 L’aspiration à grande vitesse s’avère être une stratégie de limitation viable. Une étude menée par des chercheurs de Leeds, au Royaume-Uni, visait à évaluer les straté- gies d’atténuation des risques pendant les PGA, en mesurant les concentrations virales dans l’air pendant les procédures de prépa- ration des couronnes et d’accès aux canaux radiculaires. Les procédures ont été réali- sées à l’aide d’une turbine à air ou d’un contre-angle à grande vitesse (HSCAH), avec l’utilisation de stratégies d’atténuation telles que la digue dentaire ou l’aspiration à grande vitesse ou sans stratégie d’atténua- tion. Les chercheurs ont écrit : « Par rapport à une turbine à air, le HSCAH a réduit les bioaérosols déposés de 99,72 %, 100,00 % et 100,00 % quand il n’y avait pas d’atténua- tion, d’aspiration et de digue dentaire, res- pectivement. Les concentrations de bacté- riophages dans l’air ont été réduites de 99,98 %, 100,00 % et 100,00 % avec les mêmes mesures d’atténuation. L’utilisation du HSCAH avec une aspiration à grande vi- tesse n’a entraîné aucune détection de bac- tériophages, tant sur les plaques de décanta- tion sans éclaboussures que dans les échan- tillons d’air prélevés six à dix minutes après la procédure. » Les chercheurs ont conclu que l’utilisa- tion de la HSCAH associée à une aspiration à haut volume ou à une digue en caoutchouc, permettait d’éviter une période de jachère prolongée. « Équiper nos cabinets dentaires de ces outils sera crucial pour protéger la santé, la sécurité et l’avenir des équipes et des services dentaires », ont-ils écrit. L’étude, intitulée « Dental mitigation strategies to reduce aerosolization of SARS-CoV-2 » , a été publiée dans le Journal of Dental Research le 2 août.6 Les résultats d’un certain nombre d’études suggèrent que les purificateurs d’air contribuent à réduire le risque de transmission du SARS-CoV-2 en milieu den- taire. Toutefois, comme l’a constaté l’exa- men du SDCEP, le sujet doit être étudié plus en profondeur, ce qui signifie que les den- tistes employeurs/libéraux devront peut- être évaluer personnellement la littérature avant qu’un consensus général puisse être atteint. 1 https://fr.dental-tribune.com/news/les- scientifiques-affirment-que-le-covid-19-se- propage-par-transmission-aerienne/ 2 https://www.sdcep.org.uk/wp-content/ u p l o a d s / 2 0 2 1 / 0 4 / S D C E P - R e p o r t - o n - Recent-Published-Evidence-April-2021.pdf 3 https://www.nature.com/articles/s41415- 020-2274-3 4 https://www.medrxiv.org/content/10.1101/ 2021.01.26.21250482v1 5 https://www.nature.com/articles/s41405- 021-00074-5 6 https://journals.sagepub.com/doi/10.1177/00 220345211032885?url_ver=Z39.88-2003&rfr_ id=ori:rid:crossref.org&rfr_dat=cr_pub%20 %200pubmed