Juin 2021 | Vol. 1, n°5 des antibiotiques sur les symp- tômes engendrés. L’antibioprophylaxie n’est donc pas justifiée de nos jours avant un traitement endodontique et ne devrait pas être systémati- quement hormis lorsque l’état de santé du patient le recommande [12]. prescrite, Traitement d’urgence Lorsque le patient se présente en consultation d’urgence pour des douleurs consécutives à un trai- tement endodontique en cours ou en phase d’achèvement, le praticien devra réaliser un exa- men clinique complet. La radio- graphie est indispensable afin d’identifier le problème (Fig. 3). Fig. 3 : Radiographie postopératoire d’un traitement ondodontique de pre- mière intention. L’inflammation étant installée, le patient n’arrive pas à gérer tout seul sa douleur. Seul un acte thérapeutique ac- compagné d’une prescription adaptée sera à même de faire ré- trocéder la douleur. Ce sont les symptômes qui gui- deront la prise en charge. Flambée inflammatoire Elle se caractérise par des symp- tômes qui s’apparentent à ceux d’une parodontite apicale aiguë. Les douleurs sont dues à la for- mation d’un œdème au sein des tissus périapicaux. Le chirurgien-dentiste devra ac- céder de nouveaux à l’endodonte et réaliser un parage canalaire conséquent afin de compléter la désinfection canalaire qui revêt à ce stade une importance capi- tale et d’obtenir le drainage de l’œdème périapical. Une médication intracanalaire à base d’un anti-inflammatoire (hydroxyde de calcium) peut être mise en place. En fin de séance, le chirurgien-dentiste devra limiter les pressions inter arcades sans mettre la dent en sous-occlusion d’une manière systématique, ce qui pourrait li- miter les indications prothé- tiques. La prescription d’un antalgique de palier I (paracétamol, AINS ou les deux en alternance) ou de pa- lier II (paracétamol codéiné, Tra- madol, Lamaline…) sera néces- saire afin de soulager le patient et de lui apporter un confort. La prescription d’antibiotique n’est pas indiquée, encore moins jus- tifiée dans ce genre de situations cliniques qui relèvent du flare-up. Dental Tribune Algérie CLINIQUE compagnée de symptomatolo- gie locorégionale (tuméfaction fluctuante, trismus, adénopa- thie, fièvre, altération de l’état général). Le traitement de pre- mière intention est l’amoxicil- line (1 g matin et soir) ou la clindamycine (300 mg matin et soir) en cas d’allergie aux péni- cillines. En seconde intention, une bithé- rapie par adjonction d’acide cla- vulanique ou de métronidazole peut être envisagée. Réflexion Les diverses recommandations de la communauté scientifique sont claires sur le fait que l’accès à l’apex est le facteur qui favorise considérablement la baisse de l’inflammation. Cependant, dans certains cas, la ré intervention est impossible ou présente un rapport bénéfice/ risque désavantageux. C’est sou- vent le cas en soins d’urgence où le praticien ne présente pas de créneaux horaires suffisam- ment longs pour réaliser le trai- tement de façon convenable. Le retraitement orthograde, quand bien même pourra être entrepris en urgence, il doit se faire dans des conditions d’asep- sie rigoureuses (digue, hypochlo- rite de sodium, hydroxyde de calcium). Les étapes chrono- phages du retraitement endo- dontique sont incompatibles avec les gestes prodigués en ur- gence. Aussi quand le patient présente un état d’anxiété trop important vis-à-vis de l’acte à réaliser. Il peut être alors dangereux pour le praticien et le patient d’envisa- ger une quelconque approche thérapeutique. Ce dernier peut Flambée infectieuse Elle se caractérise par des symp- tômes qui évoquent ceux d’un abcès apical aigu (douleur spon- tanée, exacerbée par la percus- sion et la pression, ainsi que par la palpation apicale). Lorsque la charge bactérienne est impor- tante l’envahissement des tissus périapicaux se fait rapidement. La réaction inflammatoire s’ac- centue ; une zone de liquéfaction purulente se forme et détruit les tissus péri radiculaires, souvent accompagnée d’un gonflement des tissus mous périphériques. Comme pour la flambée inflam- matoire, le chirurgien-dentiste devra accéder de nouveau à la to- talité de l’endodonte et réaliser un parage canalaire adéquat afin d’obtenir le drainage de l’abcès périapical. Une irrigation abon- dante à l’hypochlorite de sodium puis la pose d’une médication in- tracanalaire (hydroxyde de cal- cium) sera mise en place en inter séance afin de compléter la dé- sinfection et de baisser la charge bactérienne ainsi que l’inflam- mation périapicale. En fin de séance, le chirurgien-dentiste devra limiter les forces de pres- sion inter arcades comme vu précédemment. Un drainage par voie muqueuse sera effectué si ce dernier par voie trans canalaire s’avère in- suffisant voire impossible. La prescription d’un antalgique de palier I (paracétamol, AINS ou les deux en alternance) ou de pa- lier II (paracétamol codéiné, Tra- madol, Lamaline...) sera prescrit en fonction de l’intensité de la douleur. Selon la ESE [13], la prescription d’antibiotique n’est indiquée que si la flambée infectieuse est ac- Tableau 2 : Prescription type dans le cas d’une flambée inflammatoire ou infec- tieuse avec intervention possible. Tableau 3 : Prescription type dans le cas d’une flambée inflammatoire en cas d’im- possibilité d’intervenir. Tableau 4 : Prescription type dans le cas d’une flambée infectieuse en cas d’impossibilité d’intervenir. 13 Références bibliographiques [1] Pak JG, White SN. Pain Prevalence and Severity before, during, and after Root Canal Treatment : A Systematic Review. J Endod 2011 ; 37(4) : 429-438. [2] Sipaviciute E, Maneliene R. 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Si les symptômes correspondent à une inflammation locale (dou- leur spontanée, douleur à la per- cussion, mais pas à la palpation), la prescription d’AINS type ibu- profène 400 mg, avec trois prises par jour (sans jamais dépasser la dose de 1200 mg/j) est réalisée. Cette prescription peut être complétée par un antalgique de palier II, en alternance, dans le cas de douleur sévère. Si les symptômes correspondent à une flambée infectieuse (douleur spontanée, douleur à la percussion et à la palpation, sensation de dent longue, la pres- cription d’antibiotiques à large spectre type Amoxicilline (1 g matin et soir) pendant 7 jours en complément de l’AINS est réali- sée. Conclusion Idéalement, le chirurgien-den- tiste souhaiterait qu’il existe une recette miracle pour éviter les douleurs à ses patients. De par l’évolution de la société, la dou- leur postopératoire devient de moins en moins tolérée par le pa- tient. La perte de temps (consul- tation en urgence), d’énergie (douleur nocturne, manque de concentration au travail, irritabi- lité due à la douleur…) et de confiance envers le praticien est difficile à vivre pour le patient, mais aussi par le praticien. C’est pourquoi le praticien doit établir une stratégie adaptée à chaque patient. En préopéra- toire, le praticien devra d’établir un diagnostic endodontique pré- cis, mais aussi savoir appréhen- der l’aspect psychologique de son patient afin de lui fournir une explication rationnelle et convaincante (ni trop alarmante, ni minimisant les risques de douleur). En cas d’apparition ou d’augmentation de douleur pré- existante, le praticien devra sou- lager le patient par un geste thé- rapeutique précis et une pres- cription médicamenteuse, sans occulter les doléances du patient.