4 COMMUNICATION Dental Tribune Édition Française | Mars 2020 services dentaires par les patients.2 Au contraire, la diminution des visites dentaires durant la crise économique mondiale des années 2007–2012 n’a pas été compensée.3 En Espagne, le nombre de professionnels de la santé bucco-dentaire va augmenter de 50 % d’ici à 2020 tandis que l’accroissement de la population est estimé à juste 2 %. Ce dé- séquilibre de l’offre et de la demande influe négativement sur les cabinets dentaires pri- vés gérés par les chirurgiens-dentistes. Aux États-Unis ainsi qu’en Espagne, la tendance montre que les chirurgiens-dentistes exercent plus souvent en milieu d’entreprise et de groupe.4 Par conséquent, outre le souci du bien-être des patients, la viabilité d’un ca- binet dentaire requiert la mise en œuvre de nouvelles stratégies, pour assurer la fidélisa- tion des patients. En général, une solide rela- tion entre le praticien et le patient favorise la fidélisation et maximise la satisfaction du ponctuel « 7/12 » avec les patients », ou sim- plement stratégie de contact « 7/12 », consiste à contacter le patient sept fois sur une période de 12 mois afin de le sensibiliser à l’importance des soins préventifs et des mesures personnelles d’hygiène bucco- dentaire.1 Ces contacts ponctuels avec le patient comprennent des outils tels que des mes- sages en ligne, des courriers imprimés et électroniques. Les patients ont reçu des bro- chures d’information et des bulletins insis- tant sur la santé bucco-dentaire et couvrant également les maladies bucco-dentaires fré- quentes, notamment la gingivite et la paro- dontite. En outre, des magazines portant sur des informations sur la santé bucco-dentaire et des cartes des fêtes annuelles ont été en- voyés aux patients. Cette stratégie de contact ponctuel vise à encourager le patient dans sa décision de consulter le chirurgien-dentiste Nombre de patients actifs N Moyenne 10 692,00 Pré-stratégie « 7/12 » Post-stratégie « 7/12 » 10 1 293,40 Écart-type 437,74 454,47 Minimum 261,00 591,00 Maximum 1 644,00 2 152,00 Médiane 607,50 1 160,00 Tableau 1 : Nombre de patients actifs au cours de la période pré et post-stratégie de contact « 7/12 ». Patients acquis par recommandation de bouche-à-oreille Pré-stratégie « 7/12 » Post-stratégie « 7/12 » N Moyenne Écart-type (%) Minimum (%) Maximum (%) Médiane (%) 10 22,55 10 46,67 25,51 20,18 0 20,00 69,57 78,90 15,00 48,24 Tableau 2 : Pourcentage de patients acquis par recommandation de bouche-à-oreille avant et après la stratégie de contact « 7/12 ». Nombre de premières visites Pré-stratégie « 7/12 » Post-stratégie « 7/12 » N Moyenne Écart-type Minimum Maximum Médiane 8 8 240,13 331,50 139,54 170,16 115,00 160,00 475,00 568,00 179,50 239,50 Tableau 3 : Nombre de premières visites d’un patient pendant 2 années avant et 2 années après la mise en œuvre de la stratégie de contact « 7/12 ». patient.5 De même, cette relation essentielle est un moyen efficace de faire face aux di- verses convictions en matière de soins de santé, de créer la confiance, et d’encourager les soins préventifs.6, 7 L’ADA (American Dental Association)8 re- commande des visites dentaires préven- tives une ou deux fois par an à des fins d’examen et de nettoyage périodique.9 Se- lon l’opinion actuelle, deux visites par an pourraient ne pas être nécessaires chez cer- tains patients dont la santé bucco-dentaire et les mesures d’hygiène personnelle asso- ciées sont excellentes, alors qu’un nombre de contrôles plus élevé pourrait l’être pour d’autres.10 Le manque de conscience et d’in- formation sur l’importance de l’hygiène bucco-dentaire est l’un des obstacles aux contrôles préventifs et aux mesures de soins personnelles.11 Dans le domaine de la publicité, une fré- quence effective est à la base d’une théorie es- sentielle postulant qu’un consommateur doit être exposé à un produit un certain nombre de fois, afin d’obtenir une réponse.12 Bien que ce nombre ne semble pas être spéci- fiquement « magique », la tactique générale du marketing préconise la règle de 7, selon la- quelle le consommateur doit être exposé à un produit au moins sept fois sur une période de 18 mois, avant de retenir son attention.13 De plus, l’arrêt des publicités et des contacts avec le consommateur durant plus de 6 mois risque de diminuer irrémédiablement sa sen- sibilisation et son attrait à l’égard du produit.14 À l’heure actuelle, on estime qu’il n’existe au- cune donnée sur le nombre d’informations éducatives qu’une personne devrait recevoir en dehors de la clinique dentaire, pour l’en- courager à maintenir de bonnes habitudes personnelles d’hygiène bucco-dentaire. La nouvelle approche éducative du pa- tient, désignée par « stratégie de contact lorsque le moment de contrôles préventifs est venu. L’objectif de cette étude était d’évaluer l’efficacité de la stratégie de contact « 7/12 » par rapport à la visite de rappel annuelle traditionnelle au regard : du nombre de patients actifs, du pourcentage de patients acquis grâce à la recommandation de bouche-à-oreille des patients actifs, et du nombre global de première visite effectuée par les patients actifs ou de nouveaux pa- tients acquis sous l’effet du bouche-à-oreille. Matériaux et méthodes Dix cliniques indépendantes, situées en Espagne, ont été incluses dans l’étude au cours d’une période de 48 mois (durant 24 mois avant et 24 mois après la mise en œuvre de la stratégie de contact « 7/12 »). En moyenne, les cliniques disposaient de 3,0 ± 1,0 fauteuils, de 4,0 ± 1,0 assistants, et de 1,5 ± 0,05 responsables de service. Les données ont été collectées par le service d’accueil au moment de l’enregistrement du patient et stockées dans le système infor- matique de la clinique. Les données ont été catégorisées dans les trois groupes sui- vants : 1 Nombre de patients actifs 2 Pourcentage de nouveaux patients acquis par le biais du bouche-à-oreille parmi les patients actifs 3 Pourcentage de premières visites effec- tuées par des nouveaux patients acquis par le biais du bouche-à-oreille et des pa- tients se présentant sans rendez-vous. Pour analyser les effets de la stratégie de contact « 7/12 », des statistiques descrip- tives (moyenne, écart-type, minimum, maximum, et médiane) ainsi que le test de Wilcoxon ont été utilisés pour comparer les données pré et post-stratégie. En raison de la taille de l’ensemble de données, nous avons utilisé la valeur médiane ainsi que la moyenne pour donner un tableau plus com- plet. La différence statistique a été définie par P < 0,05. L’analyse statistique a été réalisée à l’aide du logiciel SPSS, version 15.0 pour Microsoft Windows (SPSS Inc., Chicago, IL, États-Unis) de St Halley Statistics. Résultats les augmentations de Pour évaluer l’efficacité de la stratégie de contact « 7/12 » quant au nombre de pa- tients actifs, la moyenne et de la médiane ont été calculées sur 2 années avant et 2 années après la mise en œuvre (Tableau 1). Le nombre moyen de patients actifs après la mise en œuvre de la stratégie a augmenté de 86,9 %. Après la mise en œuvre de la stratégie de contact « 7/12 », le pourcentage de patients qui s’étaient présentés dans les cliniques re- commandées par le bouche-à-oreille a éga- lement augmenté (Tableau 2). La médiane a augmenté de 33,2 % et la moyenne de 24,1 %. La dernière variable, le nombre de pre- mières visites de patients, a montré une augmentation de 38,05 % dans les 2 années suivant la mise en œuvre marketing de la stratégie de contact « 7/12 » (Tableau 3). Dans le cas des premières visites de pa- tients, seules huit cliniques ont été prises en compte (N = 8) car un problème de numéri- sation de deux cliniques a posé un frein au processus de comptage des premières vi- sites. Ceci explique la valeur nulle du pour- centage dans la colonne minimum du Ta- bleau 2 relatif aux recommandations par bouche-à-oreille. La relation entre la stratégie de contact « 7/12 » et le nombre de patients actifs, le pourcentage de patients acquis par le biais du bouche-à-oreille, et le nombre de pre- mières visites est significative et positive (p = 0,005, p = 0,005, p = 0,012, respective- ment). Discussion Dans le domaine de la médecine dentaire, la relation entre le praticien et le patient est cruciale pour fidéliser les patients. Selon l’ADA, les patients peuvent être catégorisés en patients actifs ou inactifs, les patients actifs étant ceux qui consultent leur chirurgien-dentiste dans un intervalle de 24 mois.8 Dans cette étude, nous avons tou- tefois défini les patients inactifs comme des patients ne se présentant pas au cabinet dentaire pendant 16 mois. Nous avons établi ce seuil pour qu’il serve de ligne directrice actuelle incitant à passer au moins la visite préventive annuelle.15 La valeur vie client est définie comme les revenus que le client peut générer au sein d’une entreprise, sur la durée de leurs relations.16 Cette définition peut rapidement être appliquée au secteur dentaire et, sous cet angle, on se rend aisé- ment compte que les patients inactifs ont un impact négatif sur l’économie du cabinet dentaire. Qui plus est, la santé bucco- dentaire du patient et sa perception des soins préventifs associés peuvent égale- ment être affectées si ce patient ne consulte pas un chirurgien-dentiste régulièrement et/ou ne prend pas de bonnes mesures per- sonnelles d’hygiène bucco-dentaire. Par conséquent, une sensibilisation régulière du patient centrée sur celui-ci, efficace en termes de coûts, fondée sur la loyauté et qui favorise la fidélisation semble être une stratégie robuste au sein du cabinet den- taire moderne.17 Cette technique proposée semble appuyer l’objectif déclaré. La création d’une relation de longue du- rée avec le consommateur est le fondement de la théorie du « marketing relationnel ».18 Le marketing relationnel se concentre sur la relation à long terme avec le consommateur et la garantie d’offres personnalisées, tout en renforçant les liens avec le consomma- teur en vue d’avantages réciproques.19, 20 En 1990, Gronroos a en outre évoqué que le marketing relationnel est une relation qui cherche à atteindre l’objectif de toutes les parties concernées grâce à des échanges et des engagements réciproques.21 Le marke- ting relationnel diffère du marketing tran- sactionnel classique qui vise à la vente ponctuelle dans un espace de temps très court, sans tenir compte de l’aspect fidélisa- tion ou contact avec le consommateur.22 Lorsqu’il s’agit de la pratique des soins de santé, une relation solide et longitudinale entre le praticien et le patient est impérative et doit permettre l’application des concepts de marketing relationnel. Les soins de santé sont un aspect extrêmement personnel et requièrent par conséquent un effort soute- nu pour fidéliser le patient.23 Une relation à long terme, guidée par une personnalisa- tion des soins au patient, ne pourra se maté- rialiser que dans un système qui comprend et répond aux besoins des patients. Selon Oliver, la fidélité peut être définie comme un engagement profond d’acheter une nouvelle fois ou de façon régulière un service en dépit des facteurs situationnels et des influences du marketing.24 Dans la même optique, les patients fidèles restent attachés à un cabinet dentaire plus long- temps, passent davantage de visites de contrôle préventives, et concourent à géné- rer des revenus supérieurs au sein du cabi- net dentaire sur le long terme.25 La fidélité économise jusqu’à six fois le temps néces- saire à attirer un nouveau patient.26 Enfin, des patients fidèles sont enclins à recom- mander le cabinet à d’autres patients et ces derniers se montrent souvent encore plus fidèles au cabinet que les patients qui se présentent via d’autres services.27 La fidélité n’a pas été directement évaluée dans cette étude mais nous pensons pouvoir tirer une solide conclusion. Puisque la fidélité est considérée comme le recours régulier à des services, nous concluons que l’augmenta- tion de 86,9 % du nombre de patients actifs dans cette étude correspond à la notion de fidélité. Dans l’étude, nos patients actifs pas- saient une visite ou plus sur une période de 24 mois. Des visites plus nombreuses du pa- tient chez son chirurgien-dentiste, particu- lièrement des contrôles périodiques pré- ventifs, permettent également au praticien de mieux évaluer et prendre en charge la santé bucco-dentaire du patient ainsi que de conseiller constamment le patient et de comprendre ses besoins. Il existe de nombreuses autres possibili- tés de promouvoir l’assiduité aux visites dentaires, dont l’envoi de simples rappels.28 Ici, nous évoquons le marketing de contenu et la probabilité que des informations en- voyées par le biais de journaux, de lettres, de blogs favorisent l’augmentation des vi- sites de contrôle au cabinet, et des recom- mandations en faveur du cabinet. La méde- cine dentaire, comme tous les soins de san- té, devrait utiliser le marketing éthique pour attirer l’attention des patients sur im- portance de leur santé bucco-dentaire et des soins associés. Ces outils de marketing com- prennent l’éducation et la fourniture d’in- formations proactives afin d’encourager les patients à se présenter régulièrement et tout naturellement à leur contrôle pério- dique. Limitations Bien que les données statistiques appuient les avantages de la stratégie de contact