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Dental Tribune Édition Française

Dental Tribune Édition Française | Novembre 20126 Leproblèmeduchoixentrel’usagedelaté- tine ou de la succion du pouce est un pro- blème récurrent qui concerne le parents, les médecins, les pédiatres, les dentistes ou les orthodontistes. La question sous-jacente est de savoir si l’utilisation de l’un ou de l’autre a une in- fluence néfaste sur la croissance harmo- nieuse des maxillaires. Il est incontestable que l’utilisation d’une tétine durant la première année de la vie a diminué d’une manière très significative le nombrededécèsparmortsubitedunourris- son. Il est incontestable aussi que l’utilisation delatétinefacilitel’endormissementdesen- fantsetapporteauxparentsdesmomentsde quiétude bien indispensables dans notre ci- vilisation actuelle où les mamans n’ont pas toujours la possibilité de trouver tout le temps qu’elles souhaiteraient consacrer à leur bébé. Mais il faut savoir que l’activité des mus- cles des joues et des lèvres durant la succion entraînedesdéformationsdanslestroissens del’espacequisiellesnesontpastropimpor- tantespourrontsecorrigerspontanémentàl ‘arrêt de cette habitude. Une étude publiée il y a une dizaine d’an- nées en Suède démontre que son utilisation audelàdedeuxansentraîneunediminution delacommunicationetdesacquisitionsver- bales. Toutes ces données relèvent d’observa- tionsquiontpuêtrefaitesdurantenvironun siècle et demi. Et cela fait des milliers d’an- nées que l’enfant suce son pouce. Progrès ou pas dans l’uti- lisation puéricultrice de ces inventions conçues au dé- but de l’ère industrielle ? Bien évidemment les conséquences sur la crois- sance eumorphique de la faceinférieuredelafaceont faitl’objetdetrèsnombreu- ses observations mais comme toute règle a ses ex- ceptions on rencontre des enfantsqui,malgréunesuc- cionprolongéedupouceou d’unautredoigt,présentent une denture parfaite. Les déformations osseu- ses sont en réalité la consé- quence d’éléments multi- factoriels qui vont interfé- rer entre eux pour corriger ou aggraver les premiers symptômes dysfonction- nels. Ainsi une étude réali- séesurl’occlusiondespetits chanteurs à la croix de bois montre que sur 62 enfants, seuls 8 présentent des dé- formations de l’occlusion dentaire nécessitant une priseenchargeorthodontique.Labonneagi- lité linguale indispensable à la pratique du chant, associée à une respiration optimale nasale explique l’influence réduite de la suc- cion du pouce puisque plus de 50% de notre échantillon continuait à sucer leur pouce bien au-delà de six ans. Maisnefaut-ilpasallerplusloinetanalyser les conséquences psychologiques induites par le maintien d’habitudes de succion. De nombreux clichés échographiques in utéro montrent que l’enfant découvre très tôtlasucciondigitaleetdurantsonenfanceil gérera seul cette partie de son propre corps. A l’inverse, la tétine sera un corps étranger introduitparlesparentsoulessoignantsque l’enfant intégrera au niveau psychologique comme une partie du monde lui apparte- nant. Tétine usée, tétine perdue, là encore l’en- fantseradépendantdansl’obtentiondesasa- tisfaction d’une personne étrangère, en l’oc- currence les parents. Ce système de dépendance me paraît être l’élément le plus important dans l’addiction à une activité procurant du plaisir, les consé- quences dans le système éducatif de l’enfant peuvent être majeures. Sinoussouhaitonsrésumer:leshabitudes de succion sont physiologiques jusqu’à l’âge dedeuxansmaisleurmaintienau-delàdecet âge les transforment en fonctions ar- chaïques. La lente maturation neurologique qui permettra à l’enfant tout en constituant sadenturelactéale,d’acquérirlamastication unilatéralealternéepermettantlepassagede nutriments mous à des nutriments com- pacts, sera retardée voire ignorée. La tétine devra avoir disparue dès l’âge de deux ans, le sevrage du pouce devant être ré- alisé avant l’âge de quatre ans. Cet abandon serafacilitéau-delàdecetâgeparleportd’un appareillage très simple qui changeant le message afférent qui arrive au cerveau per- mettra une transformation du message effé- rent. 95% de ces succions digitales sont des succionshabitudesetceprotocolepermettra un sevrage spontané sans frustration pour l’enfant et bien préférable aux protocoles comportementaux nécessitant le remplis- sage de grilles ou alternent soleils et nuages (un sentiment de culpabilité risquant de s’instituer en cas d’échec). Pour les 5% d’en- fantsquimalgrélaposedecetappareilconti- nuerontàsucerlepouce,ilfaudraconsidérer qu’ilsnesontplusdansunesuccionhabitude mais dans une succion nécessitée et que si le symptôme n’est pas forcément grave il est toujourssignificatif.Lepsychologueoulepé- dopsychiatre systématiquement consulté pourra effectuer un diagnostic différentiel entre un retard de maturation et un pro- blème plus important d’origine psycholo- gique. Danscecadreaucunetétinenepeutsepré- valoir d’une action orthodontique. BONNES PRATIQUES Pouce et tetine ? Pouce ou tétine, l’impact est sensiblement le même aux yeux du spécialiste : le pouce, plus dur et un peu plus large, « déforme un peu plus », mais la tétine est « plus pernicieuse », car elle donne bonne conscience aux parents, surtout quand elle est présentée comme « physiologique » Quoi qu’il en soit : la tétine devra avoir disparu dès l’âge de deux ans, le sevrage du pouce devant être réalisé avant l’âge de quatre ans. DR PATRICK FELLUS · Docteur en chirurgie den- taire · Docteur en sciences odon- tologiques · Spécialiste qualifié en or- thopédie dento-faciale · Président de la Société française d'orthodonthie pédiatrique · Attaché consultant – Hôpital Robert Debré – Paris · Expert près la Cour d’appel Anya Ponti /Shutterstock.com Inga Ivanova /Shutterstock.com